Les Faucheurs de Lostanges

L’HISTOIRE DES FAUCHEURS DE LOSTANGES

A l'occasion de la fête des vieux métiers de 2013, M. FERRUEL, sculpteur a réalisé "en live" une statue de faucheur, grandeur nature, en l’honneur de nos anciens (cf. photo).

Il faut savoir que jusqu’au début des années 1960, la CORREZE reste un département pauvre et que de nombreux jeunes corréziens allaient louer leurs bras dans les départements voisins, du CANTAL ou de la HAUTE-LOIRE, pour y  « faire la faux » (couper l’herbe pour en faire du fourrage d’hiver)comme leurs parents et leurs grands parents avant eux.     

Les informations suivantes ont été collectées auprès de deux habitants de la commune ayant pratiqué dans leur jeunesse ce travail de « forçat ».

Le voyage se faisait le plus souvent vers la fin du mois de juin soit en co-voiturage (après-guerre) soit en train,  (départ de la gare de BIARS/CERE jusqu’à NEUSSARGUES (CANTAL) ou CHALINARGUES)

La saison durait un mois parfois deux.

Le faucheur partait avec son matériel :

  • la faux avec un manche en frêne réalisé sur mesure en fonction de la taille du faucheur
  • le « couffin » ou « la coutière » en patois occitan est en bois de noyer évidé et étanche pour y mettre de l’eau et permet de ranger la pierre à aiguiser.
  • L’enclume et le marteau pour « piquer » la faux ,c'est-à-dire affiner le fil de la lame
  • Le change pour toute la saison

A la descente du train, ils se rendaient à la « louée » (foire à l’embauche) à ALLANCHES  ou MARSENAT, pour trouver un employeur qui lui assurait le gîte et la nourriture en plus de son salaire. Les « grosses  fermes » employaient parfois plusieurs faucheurs.

Ils travaillaient six jours par semaine, d'une étoile à l'autre (de l'Angélus du matin, 5 h 30, au coucher du soleil). Le repas de midi était pris sur place, apporté par une servante, parfois par la maîtresse de maison, suivi d'une courte sieste d'une demie heure, avant de reprendre le travail.

Il fallait d'abord couper l'herbe, (lorsque plusieurs faucheurs travaillaient en équipe, ils avançaient décalés en escalier, il fallait suivre le rythme des autres pour ne pas avoir l'herbe à faucher recouverte par celle du voisin).

Pour un travail de cette durée, il était important de savoir " piquer" la faux, surtout quand on tombait sur "la morelle des auvergnats" (sorte d'herbe très fine et très dure à couper), qu'on appelait aussi "poils de bouc".

Il fallait ensuite faner (étaler l'herbe et la retourner afin qu'elle sèche) à l'aide d'un râteau ou d'un  "boucaou " ( littéralement "corne de bouc") fourche à deux dents qu'on utilisait aussi pour charger le foin.

On pouvait alors "faire le char" ( passer le foin à la fourche aux femmes qui le rangeait méticuleusement sur la charrette pour limiter le nombre de voyages à faire jusqu'à la grange) et enfin décharger le foin dans la grange pour y faire "la motte" . Lors des voyages suivants, on n'hésitait pas à faire monter "le char" sur "la motte" pour tasser le foin et en faire rentrer un maximum dans la grange. L'édifice prenait vite de la hauteur et il fallait encourager les bœufs pour qu'ils l'escaladent, avec une poignée de sel. Le soir, dans certaines grosses exploitations, on enfermait les veaux avec un chien, pendant un moment, afin qu'ils piétinent le foin.

Le dimanche était jour de repos, le faucheur en profitait pour faire sa lessive, se raser et faire l'entretien du matériel.

A ce propos, un peu de publicité de l'époque :

"Quand midi sonnera, et que l'herbe t'emm……., avec la pierre "Pépita" *, toujours tu t'en sortiras !"

* marque de pierre à aiguiser, en provenance d'ITALIE des carrières de LOMBARDIE

Après un mois et demi de travail le salaire représentait de quoi s'acheter une paire de bœufs ce qui pour le village de LOSTANGES, représentait une belle aubaine. Un autre point de comparaison nous a été donné : en 1960, un employé de l'équipement gagnait 300,00 F de l'époque par mois, et un faucheur pouvait gagner plus de 900,00 F là aussi pour un mois.

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RITOURNELLE DE L'AFFUTEUR

Touzi, touza, Fa ren, Di ren,

Ré, ré, ré,*

Imaginez le son que faisait la pierre à aiguiser sur l'acier de la faux.

*  Touzi, touza,

Je ferai, je dirai, rien, rien, rien

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Merci à ROGER et YVES, qui se reconnaîtront, pour avoir partagé leurs souvenirs avec nous.